Poésies d'Ailen
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  1. Le Vieillard
  2. Promenade aux sommets
  3. Amoureux de la Terre
  4. Berceau d'espérance
  5. L'Oiseau beige
  6. Le Soupirail
  7. La Barrière
  8. Soupir fané
  9. Chemin

Le Vieillard

Il est venu
De son enfance jusqu'ici
Il a marché
Longtemps
De pas d'abord petits
Maladroits hésitants

Puis
D'une jambe longue
En ignorant les pierres
Il a franchi
La vie
Le vent
La pluie
La soif

Un jour
son pas tremblait d'un bruit de souvenirs
Les saisons s'empilaient sur le chemin qui monte
Et son coeur s'essoufflait

Il s'assit un moment

Quand il s'est relevé
Son regard s'est troublé
Les pourquoi
surgissaient du creux de sa pensée

Il est venu
De son enfance jusqu'ici
Nous demander réponse
Le vieillard fatigué

Son âme est nue
Comme l'enfant qui naît

Promenade aux sommets

Le temps s'offre, étalé sur les cimes
Je traverse la vie, et le vent me traverse
J'habite le silence.

                     *

Exclamation!
Le soleil jaillit
Devient étoile
Devient Dieu tout à coup

De sa pointe Nord, il saisit l'infini
Le plante au Sud
L'unit à l'immaculé de la neige
Aimants,
ses bras d'Est et d'Ouest illuminent le monde

                     *

Je laisse mes pas s'enfoncer.
Mon corps ne fait plus un geste,
fasciné par cette éternité

                     *

Un aigle attardé trace un idéogramme furtif
Que traduit-il ?

                     *

La montagne s'éteint peu à peu
Rose comme une jeune fille timide
aussi émue que moi
L'ombre l'entraîne vers le bleu
L'absence d'une nuit s'installe

                     *

Le coeur de l'âtre m'attend
Mon corps accueille sa chaleur
Un éclat de mon âme reste dehors
Au delà...
Oublie la réalité qui crépite sous mes yeux

Amoureux de la Terre

Il n'a pas voulu de cercueil
Rejeta la pierre tombale

Il voulait voir l'envers du monde
les racines
qui portent les fleurs

les insectes qui vagabondent

et le travail de la fourmi

Il respire la vie du monde
Il est heureux
Il me l'a dit

Berceau d'espérance

L'enfant seul entend sa vie qui s'imprime
dans un sourire

Les mots de son passé
fragiles
tracent son désir neuf

Le bleu de son ciel s'étonne
apprivoise l'ombre
saisit un pétale d'amour
le contemple
l'apprend un peu
sursaute à l'appel de son nom

Range soigneusement le tout
dans un oubli provisoire

L'Oiseau beige

Quand échappée de mon sommeil
J'ai entrouvert mes yeux brûlants

Un oiseau était dans ma chambre
Dans la solitude du vent
Blanc
Juste teinté d'un peu de beige
Neige
Juste teintée d'un peu de sable

Ma pupille caressait ses plumes
Y déposait un peu de brume

Mon rêve parlait liberté
Plaignait ces ailes enfermées

Et l'oiseau se tenait si loin
Craignait la chaleur de ma main

Craintif , il restait immobile

J'ai regardé vers la fenêtre
J'ai vu les rideaux la voiler

Et d'un pas très lent j'ai marché
J'ai soulevé la mousseline
J'ai ouvert la vitre tout grand

Invité l'oiseau à partir
Dans le fleuve embaumé du vent

Nous étions tous deux immobiles
Peu à peu mon coeur se serrait

Et j'ai pleuré

Le Soupirail

Regard levé vers le soupirail
Regard tendu d'angoisse
Il guettait le souffle du vent
et seules les semelles
qui martelaient la terre
envoyaient une poussière d'oxygène
en écrasant les cailloux blancs de ses espoirs

Regard levé vers le soupirail
Regard tendu d'angoisse
Il essayait de penser à autre chose
à autre chose qu'à ce reflet de brise tiède
à autre chose qu'à ce souvenir d'atmosphère

souvenir de présence

Et
quand il pensait
son souffle

s'amenuisait encore

Regard levé vers le soupirail
Regard vacillant
Il voyait les scintillements de son illusion
s'embrumer pâlir et leur lueur plâtrée
devenait humide glacée
dans le sanglot d'une seule larme

Dernière larme

Regard levé vers le soupirail
Regard trempé d'angoisse
qui creusait son coeur comme une pierre tiède
jusqu'au vertige d'un lac de chagrin
qu'il eût voulu artificiel
qu'il eût voulu...
Sourire de politesse vague.

La Barrière

Le vent de l'orage a tout balayé
Emmenant au loin orties, boues, chagrins
Il hurlait de rage.
Pour tromper ma peur j'ai pensé à vous
Et
Je savais bien qu'à l'aube nouvelle
J'aurais retrouvé les piquets couchés
Signe d'abandon, lumière sereine
J'ai pris votre main
et j'ai enjambé les bois alanguis
Nous avons marché vers le soleil neuf
Le ciel bleu rieur
Nous avons couru dansé
essoufflés sommes allongés
et le sable humide a lavé nos peines
Notre coeur est libre
Libre notre vie.

Soupir fané


Dans un grenier,
Enfouie sous des tableaux jaunis,
Une boite écrasée émet un son étrange

Brise
porte qui grince
bruits étouffés
L'écho s'essouffle

Non loin de là
Rêves épars
Des photos pâles endormies

Arrive une fillette à la vue curieuse
Et ses petites mains
se couvrent de poussière
Pour saisir une image
Un regard de grand-mère

Elle repense au roman d'hier soir
rêveuse
Souffle sur les cartons
chasse les araignées
Se raconte un roman
fait de fleurs oubliées

Assise
Au beau milieu de ce fouillis de vies.

Elle aperçoit la boîte
Entend la monodie

son coeur bat la cadence
Roulement de tambour
dans ce presque silence

Du couvercle soudain
s'échappe un air glacé
Soupir de quelque aïeul

Une âme délivrée
Entrouvre son linceul
S'échappe vers les anges

Chemin

Puisque la vie est labyrinthe
Puisqu'on se cogne à tous les cris
Puisque ces cris ne sont que plinthe
Au bas des murs qui sont écrits

Puisque nous nous cognons aux rêves
Puisque nos cheveux sont usés
Puisque l'amour est note brève
De nos espoirs désabusés

Pourrai-je couler dans le bief
Entre les écluses , la mire
Pour enfin rejoindre ton fief

Puisqu'il ne reste que le rire
A nos desirs de spasmes brefs
Puisque d'aimer est un délire

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